Artiste : Igorrr
Album : Spirituality and Distortion
Label : Metal Blades Records
Sortie : 10 avril 2020
Style : « C’est plus compliqué que ça »
HELLo, ma mission du jour consiste à tenter de vous expliquer ce qu’est la musique d’Igorrr. J’espère donc que vous êtes prêts à sortir des sentiers battus imposés par notre société… ça c’est un autre débat mais bon, on en a gros à force de bouffer toujours la même soupe à longueur de journées.
Avant toute chose, la découverte tardive de cet album intitulé Spirituality and Distorsion est pour moi une véritable révélation, une bouffée d’oxygène dans une période où littéralement tout me prend la tête (oui, mode Schtroumpf Grognon activé).
Igorrr, c’est quoi ?
Par rapport à ce que j’ai l’habitude d’écouter, cet album pourrait être, par exemple, la rencontre improbable entre Squarepusher, Venetian Snares, Devin Townsend et Fantômas, le tout agrémenté d’une vibe black metal sympho (du moins, c’est comme ça que je le ressens).
Pour faire simple, c’est un incroyable brassage de styles musicaux de tous horizons. On distingue principalement les courants metal, baroque, breakcore / jungle mais également de la musette, musique moyen-orientale, musique-8 bit (Chiptune) et j’en oublie surement d’autres… Et là certains diront : « Hein ? Mais c’est n’importe quoi, encore une musique de fous ! »
Sans limite
Oui, la musique d’Igorrr est folle ! Mais non, ce n’est absolument pas n’importe quoi. C’est simplement fou dans le sens où Gautier Serre, la tête pensante d’Igorrr, a effectué un travail titanesque pour assimiler et mixer entre elles toutes ces influences et livrer au final un album de génie et d’une finesse chirurgicale.
Pour ainsi dire, Spirituality and Distorsion est une succession de 14 montagnes russes émotionnelles. Chaque titre est ainsi une œuvre d’art à part entière recelant de multiples surprises s’enchainant avec une fluidité déconcertante. A vrai dire, après deux semaines d’écoute intense, je suis toujours bluffé par le résultat et découvre encore plein de petits détails par ci par là.
Cerise sur le gâteau, Gautier Serre s’est entouré de moult musiciens pour jouer ses partitions et ainsi éviter l’utilisation de samples. Batterie, guitare, basse, piano, violon, guitare classique, guitare portugaise, oud, kanoun, accordéon, clavecin… tout est mis en œuvre pour que la musique d’Igorrr soit la plus vivante possible.
Et question vie, la chanteuse Laure Le Prunenec apporte un supplément d’âme particulièrement poignant. Là aussi, sa prestation est tellement riche, tellement folle, j’en ai des frissons à tous les coups.
Au final, l’inspiration et la créativité débordante d’Igorrr sont sublimées et consolidées par une utilisation relativement discrète mais omniprésente de la musique électronique.
Décryptage pas à pas
Chaque morceau a un titre particulièrement explicite par rapport à l’ambiance qu’il instaure et / ou aux émotions qu’il procure. Je ne peux résister à l’envie de vous glisser un petit mot sur chacune des 14 pépites.
Downgrade Desert
Spirituality and Distorsion s’ouvre avec Downgrade Desert et sa magnifique introduction jouée au oud. Le jeu de batterie de Sylvain Bouvier est incisif et puissant et les riffs assassins, c’est la première grosse baffe. Le mixage audio de l’album est à ce titre phénoménal. Le chant de Laure de Prunenec est déchirant, c’est l’effet double lame !
Nervous Waltz
Nous sommes ici en plein voyage baroque / metal ponctué d’une déflagration de violence que n’aurait pas renié Fantômas sur Director’s Cut.
Very Noise
Il s’agit surement du morceau le plus déjanté et sans aucun doute du plus électronique de l’album. Un tour de force rythmique. Le clip vidéo est sacrément représentatif de cette folie. « HEY ! »
Hollow Tree
Ici, clavecin et chant féminin occupent une place de premier plan. Les transitions orchestrales se veulent très cinématographiques.
Camel Dancefloor
Retour dans le désert pour un dépaysement total. Les dernières secondes me rendent dingue avec des riffs black metal.
Parpaing
Mon petit doigt me dit que vous n’en êtes pas la moitié d’un, de parpaing. Le chant death est ici assuré par un invité de marque, George « Corpsegrinder » Fisher du groupe Cannibal Corpse. On pourrait croire qu’on a affaire à un « simple » morceau de death metal bien rugueux mais une fois encore… c’est plus compliqué que ça ! Parpaing va basculer, non pas du coté obscur, mais du coté des mondes de Ralph, ENORME.
Musette Maximum
Tout est dans le titre, musette et metal ne font plus qu’un ici. Un pari des plus osé mais diablement efficace et une fois plus, inattendu !
Himalaya Massive Ritual
Info technique : les percussions utilisées pour l’introduction et la conclusion de Himalaya Massive Ritual sont le fruit d’un instrument fait maison (le 3ème dans cette vidéo). Ca se passe comme ça chez Igorrr, on est jusqu’au-boutiste et on fabrique son propre matos.
Lost in Introspection
Etonnament à la première écoute, je crois que c’est le morceau qui m’a le plus désarçonné par rapport à l’ensemble. Désormais je ne résiste plus à son piano omniprésent et à son final grandiloquent façon black sympho.
Overweight Poesy
Amis de la poésie bonsoir. Après une magnifique introduction toute en délicatesse, l’ombre de Fantômas plane sur les premier riffs. La cadence s’emballe puis le piano s’installe pour finir sur de douces notes.
Paranoid Bulldozer Italiano
Squarepusher et Aphex Twin sont dans la place pour lancer ce titre de manière expérimentale. Le metal reprend vite le dessus. Comme à son habitude depuis le début de l’album, Laurent Lunoir se déchaine avec ses hurlements. Quand tout à coup, nous passons en mode baroque sous acides, grisant !
Barocco Satani
Ambiance cinématographique, vampirique et « Doomesque » du coté de Barocco Satani. C’est totalement envoutant. Les enfers se déchainent sur Terre pour le grand final.
Polyphonic Rust
Après l’obscurité, place à un Polyphonic Rust tout en lumières.
Kung-Fu Chèvre
Ou comment boucler l’album en beauté dans une ambiance sicilienne, chèvre et… funky !
Pour finir, je n’ai qu’une chose à dire : merci Igorrr pour cette créativité sans limite !
Des artistes de cette trempe, c’est très important pour la santé du cigare.
Spirituality and Distortion – Tracklist
- Downgrade Desert
- Nervous Waltz
- Very Noise
- Hollow Tree
- Camel Dancefloor
- Parpaing
- Musette Maximum
- Himalaya Massive Ritual
- Lost in Introspection
- Overweight Poesy
- Paranoid Bulldozer Italiano
- Barocco Satani
- Polyphonic Rust
- Kung-Fu Chèvre
Parenthèse nostalgique
Alors que je lisais quelques interviews de Gautier Serre, quelle ne fut pas ma surprise de découvrir qu’il était fan du jeu video Music, époque PS One. Qu’est ce que j’ai pu passer des heures à créer ma propre musique grâce à ce jeu et à sa suite Music 2000. C’était passionnant. On avait même la possibilité d’enregistrer nos propres samples et de les stocker sur la carte mémoire de la console. Je serais vraiment curieux d’écouter ce qu’il composait à l’époque. Il faudrait vraiment que je m’y remette…
Effectivement c’est décoiffant, very noise sympa, le reste c’est pas pour moi, même si j’aurais aimé découvrir kung-fu chèvre, Lol, rien que le nom m’amuse.
Ah ben j’aurais même pas cru pour Very Noise 😉